Description
Né sous la Restauration, alors que la presse, malgré les censures, part « à l’assaut de la monarchie », Figaro est un petit journal satirique qui passe de mains en mains. L’un des principaux apports de l’ouvrage est d’établir la chronologie fine de la succession des premiers Figaro. Elle permet de percevoir l’évolution des relations du titre avec le pouvoir, l’importance de la caricature dans cette opposition, et dans les affrontements entre les journaux ; enfin l’impossibilité de la satire pour un titre devenu trop proche du gouvernement. Sa prospérité financière de la fin du XIXe siècle donne au Figaro le loisir d’investir dans de coûteuses nouvelles formes de journalisme, comme le grand reportage. Mais il cultive toujours les domaines critiques qui ont fait sa réputation. Socialement conservateur, le titre est innovant dans les formes journalistiques. La diversité des couleurs politiques de son lectorat le conduit à être un des premiers quotidiens à passer du publicisme engagé de la presse d’opinion au journalisme politique de la presse d’information.
Difficultés administratives et désorganisation de la rédaction, poids de la censure et force de la propagande se conjuguent pendant la Première Guerre mondiale. Géré par une équipe âgée du fait de la mobilisation, Le Figaro perd encore la confiance de son lectorat. Plus encore que les autres titres, Le Figaro doit donc faire face à de nombreux défis pendant l’entre-deux-guerres. Influencée quelques années par les engagements fascistes de François Coty, la chronique politique est aussi marquée par l’anti-parlementarisme de Lucien Romier. La nouvelle équipe, très littéraire, mise en place par Pierre Brisson à partir de 1936, opère des mutations sans rupture : Guermantes, alias Gérard Bauër, y cultive la nostalgie de la Belle Epoque, sans céder aux sirènes de la dénonciation de la décadence. Il prépare ainsi les prises de position du Figaro dans la querelle des Mauvais Maîtres, qui s’imposera comme une ligne de conduite pendant l’Occupation.
Epargné par les ordonnances de la Libération, Le Figaro peut reparaître à Paris à partir du mois d’août 1944. François Mauriac en devient la figure de proue. A l’inverse des idées reçues, on peut dire que ses interventions se situent en complémentarité avec celles de Raymond Aron, engagé en 1947, qui impose progressivement ses analyses sur la scène médiatique. C’est dans la combinaison de ces points de vue éditoriaux que se situent les prises de position du Figaro. Pierre Brisson joue en cette époque un rôle pivot, sa disparition plonge le journal dans la crise. En dix ans de lutte, les journalistes affinent leurs modes de mobilisation et posent les enjeux des questions qui agitent Le Figaro d’aujourd’hui autour de la régulation des relations entre propriétaires et rédaction.