Description
Jusqu’à présent, aucun ouvrage ne s’est intéressé à la diffusion des photographies des soldats. Que savait le public des situations de souffrances extrêmes dans lesquelles vivaient les leurs ? Que voyait-il de la réalité de la mort, des destructions, des combats ? Véritable interface entre le monde de la guerre et celui des non-combattants, la presse est investie en 1914, d’une mission essentielle, quand le public devient l’arrière. Les lecteurs impliqués affectivement mais tenus physiquement éloignés du conflit, sont habités par une soif de savoir qui s’accroît au fil des semaines. Rapidement, ils veulent voir.
Cette étude de la presse illustrée de l’époque révèle que les hebdomadaires traquent le scoop ou inventent de nouvelles formes de reportages pour immerger le lecteur dans la sensation d’une guerre vécue. Corps propulsés dans les arbres ou jambe abandonnée dans le No man’s land, paysage de forêts dévastées ou champs de bataille poubelles, toutes ces situations intolérables sur la mort au front sont exhibées dès 1914. Contrairement à la vulgate, les thèmes que Le Miroir aborde sont particulièrement brûlants et les photographies qu’il publie, exceptionnellement parlantes. Le constat s’impose : contrairement à ce que la vulgate pacifiste de l’entre-deux guerres – poursuivie jusqu’à nos jours – affirmait, l’arrière savait, et savait tout, autant le public érudit de L’Illustration que les lecteurs plus populaires du Miroir. Parce qu’il était la victime humiliée dans la chair de son territoire ruiné et dans la blessure ravivée de la défaite passée, l’arrière avait quand même consenti.